Amar BELLAHCENE

 

Université d'Oran

 

 

 

 

 

 

 

 

 

LE RETOUR DU TEXTE

 

A propos de la traduction de la littérature algérienne d'expression française en langue arabe

 

 

 

 

 

 

PRELIMINAIRES

 

 

     "Beit El-Hikma", cette prestigieuse institution-phare fondée    par le Khalife Abbasside Al-Maamoun (813-833) où les langues et les cultures trouvaient leurs cadres de dialogues, n'apparaît aujourd'hui, hélas, que comme une page d'histoire ou de mémoire lontaine, étrangère au présent de la culture arabe et son dynamisme actuel. Cette institution historique n'est autre qu'un souvenir pétri d'une civilisation passée, la civilisation où le livre valait son pesant d'or.Ainsi donc, on ne peut dire qu'à l'ère de la révolution informatique, de la massification des cultures et des langues, la culture arabe possède sa maison de "Hikma", et sa balance de précision       pour la traduction. Sa décadence, suivie ou couronnée par la colonisation avec ses résidus et ses dérivés, a abouti à travers un processus complexe à un retard alarmant de la traduction dans le monde arabe, eu égard aux autres langues universelles.

 

     Anciennement, les Arabes n'ont pas traduit les formes poétiques, mais ils ont axé leur effort sur la science et la "Hikma" (philosophie). Cela s'explique par une certaine autosatisfaction de la part de ceux qui possè­dent et maîtrisent une "poétique" qui a investi tout écrit. La poésie était "le Diwan" des Arabes, leur univers symbolique, leur bien de mémoire et de référence par excellence[1]. Mais avec l'avènement du pluriculturalisme, le développement de l'industrie et la diffusion du livre, l'émergence des litté­ratures nationales, l'institutionnalisation de l'universalisme, la traduction est devenue une nécessité et un canal stratégique pour l'écrit, en dépit de la mondialisation de l'audiovisuel et de son hégémonie. Aujourd'hui, le dé­veloppement d'une culture et son épanouissement dépendent de sa capa­cité à assimiler les autres cultures, et à dialoguer avec elles. La traduction avant d'être un processus linguistique, est avant tout une ouverture, un dialogue des sensibilités, un relais d'acculturation, un discours de l'homme unique et multiple.

    

     La traduction dans la culture Arabe contemporaine est restée, à quelques exceptions près, une initiative individuelle ou collective limitée et isolée. Elle n'est pas structurée dans des institutions et des mouvements culturels à l'instar de "Beit-El-Hikma" où les relations avec les autres cul­tures étaient gérées d'égal à égal. Et au demeurant, la traduction est res­tée prisonnière de son caractère spontané, sélectif et exclusif, et sujette à des normes où s'entremêlent l'idéologique, le commercial et le cognitif. Qu'elle soit interlangue ou intersémiotique, la traduction du français à l'arabe pose le problème de l'élargissement de l'univers de la langue et de la transformation de ses structures profondes et formelles. La tâche se complique davantage quand il s'agit de la littérature comme forme poé­tique par excellence.

 

 

 

 

LA LEGITIMITE MALAISEE

 

 

     La traduction de la littérature algérienne d'expression française (L.A.E.F.) pose a priori trois interrogations :

     1°) La place de cette littérature dans le système littéraire algérien contemporain en ce qui concerne sa réception par les critiques et les écri­vains et les traducteurs arabophones et leurs positions qui influent la lec­ture et la traduction.

     2°) La situation actuelle de cette traduction et ses problèmes.

     3°) La problématique de son intégration dans la littérature algé­rienne et arabe, avec ce que cette intégration suppose comme intertextua­lité entre la littérature écrite en arabe et celle écrite en français.

 

     On ne peut ignorer, ni encore nier le "dualisme" de l'intelligentsia algérienne, univers fondé sur l'"unicité linguistique" qui trouve sa cause dans le passé et l'histoire. Je ne parlerai pas de bilinguisme comme dirait A. Mazouni[2], car le bilinguisme suppose la maîtrise de deux langues, la référence à deux registres culturels. En effet, ayant repéré ce dualisme, Mostefa Lacheraf appelle à "un double effort de traduction" allant du Fran­çais à l'Arabe et vice-versa, dans le but de réaliser un enrichissement mutuel entre le patrimoine arabe et la modernité française[3]. En dépit de cet appel, la traduction de cette production    intellectuelle et littéraire ne s'est réalisée que dans une faible proportion. L'oeuvre de Lacheraf lui-même, L'Algérie: Nation et Société, n'a été traduite qu'en 1984, vingt ans après sa publication en français[4]. Ce retard s'explique en premier lieu par la faiblesse d'une intelligentsia outillée et consciente, puisant dans deux registres et qui appartient évidemment à une même culture, mais qui se démarque de tabous de l'unicité linguistique , de ses dépendances culturelles passées et de leurs dérivés psycho-inconscients[5].

 

 

La L.A.E.F. et sa réception en langue arabe

 

     En dépit de sa légitimité idéologique en tant que texte inscrit dans le discours nationaliste et de sa riche représentation du projet national libé­rateur, et en dépit de sa contribution à la formation de l'univers symbolique de l'homme algérien et à sa recherche permanente de l'identité, de la li­berté et de la révolution, la L.A.E.F. est restée prisonnière de "l'image du Français" en tant que langue et culture où s'entremêlent la violence sym­bolique, l'acculturation, la déculturation et la modernité. Le statut de l'écrivain algérien de langue française diffère de celui de son collègue égyptien, libanais et même marocain et tunisien. Cette différence trouve son explication dans tout ce que la langue maternelle et la langue        arabe en tant que langue de l'écriture ont subi. D'ailleurs, la langue arabe est re­devenue dès le mouvement national et à l'indépendance la langue offi­cielle et/ou nationale.

 

     Cet arrière fond sociolinguistique reflète en lui-même le statut com­bien complexe de cette littérature dans le contexte de la littérature algé­rienne de l'après indépendance. Cette complexité s'explique par cette ac­culturation due à l'histoire linguistique et culturelle de la colonisation et de son école. Après l'indépendance, la place objective et privilégiée du fran­çais en Algérie n'a fait que compliquer encore ce statut.

 

     La polémique sur l'algérianité, la maghrébinité de la L.A.E.F. nous intéresse peu, et nous préférons entamer d'abord la lecture de la critique littéraire arabophone et de certaines introductions de traducteurs de cette littérature. Nous nous référons surtout aux thèses significatives qui ont le plus annoncé et exprimé le caractère confus et complexe du statut de la L.A.E.F., tout en essayant d'interroger cette traduction et ses incidences sur la littérature algérienne de langue arabe.

 

     Le critique algérien A. Rekibi lie l'écriture en français à l'histoire de la langue arabe pendant la période coloniale. Cette histoire aboutit, selon lui, à une bipolarisation culturelle et littéraire, où l'écrivain en français se trouve de prime abord en rupture avec sa culture et sa langue d'origine. Cette rupture a agi sur la langue d'écriture, sur les conceptions et l'expression de cet écrivain. La négation s'est approfondie davantage avec l'avènement de la guerre de libération et de tout ce qu'elle a charrié de sentiment nationaliste. Cet état de fait a radicalisé l'opposition et le refus de tout ce qu'a apporté la culture française avec elle: traditions, modes de vie, et littérature[6]. Cette rupture et ce contexte ont poussé certains cri­tiques à nier tant l'algérianité que l'arabité de cette littérature, en ignorant ou feignant d'ignorer la différence fondamentale entre la L.A.E.F. et la litté­rature des Français d'Algérie.

 

     Rekibi accorde la légitimité idéologique et littéraire à la L.A.E.F en dépassant le problème de la langue, sur la base de deux critères: la vision et le réalisme. La vision de la L.A.E.F. la lie à la patrie et à la Nation algé­rienne et à ses idéologies, tandis que le réalisme signifie la représentation exacte de l'identité de l'Algérien, loin de toute écriture exotique ou algéria­niste. Dans ce contexte, Rekibi procède à une valorisation objective de l'apport de la L.A.E.F., qui a introduit des genres modernes, contrairement à la littérature d'expression arabe qui n'a pas connu ces genres du fait de la décadence de la culture arabe. Et après avoir évoqué la tension de l'énonciation, le problème de la traduction de la L.A.E.F., de sa lecture et de son éloignement progressif de son lectorat, il conclut : "La L.A.E.F. est le produit de conditions historiques transitoires. Si elle est écrite en fran­çais elle n'a pas moins exprimé un contenu algérien, et une réalité natio­nale, ce qui lui accorde logiquement le statut de littérature nationale. Ce­pendant cette littérature n'est pas arabe du fait qu'elle n'a pas été écrite en langue arabe"[7].

 

     A. Cheriet, évoquant lui aussi les paramètres de la civilisation et de la culture, insère cette littérature dans le sillage de la littérature algérienne et arabe: "La culture doit-elle être limitée seulement à la langue qui l'exprime, ou bien reflète-t-elle une civilisation plus vaste que la langue elle-même ? Là, nous abordons le cas des écrivains algériens d'expression française. Ces derniers appartiennent-ils à la culture arabe            ou non? Si l'on tient compte du facteur langue seulement, on ne peut que les ignorer. Mais si l'on s'attache au fait de civilisation, ces gens ayant vécu dans une société de civilisation arabe et islamique et ont donné une image plus ou moins fidèle de cette société et de sa réalité..."[8]. La L.A.E.F. étant inscrite dans ce référent culturel arabo-islamique, elle ne peut qu'en faire partie.

 

     M. El Mili avance le terme de "souffle maghrébin" pour délimiter sa vision de cette littérature qui n'est en fin de compte que le reflet d'une dé­perdition culturelle. El Mili définit cette littérature à partir de sa crise in­terne: crise de son expression, silence de certains de ses écrivains tels Haddad, Kateb et Mammeri, représentation de tendances contradictoires (arabo-musulmanes, populisme et berbérisme), ce qui a rendu le statut de la L.A.E.F. malaisé et sa légitimité confuse[9]. Otman Saadi, de son côté, considère cette littérature comme un phénomène local, marginal de la vie littéraire algérienne, produit occidental de l'histoire culturelle. Cette littéra­ture est pour lui vouée à la disparition[10]. Abdelmalek Mortad enfin nie l'existence même de cette littérature, tout en lui reconnaissant le mérite de contenir des éléments propres à la personnalité algérienne. Il l'insère dans ce qu'il appelle "le conflit entre la langue arabe et le français en Algérie"[11].

 

     Ces critiques de langue arabe présentent donc la L.A.E.F. comme une littérature en crise, dont le sort est conditionné par les enjeux et le mouvement de l'arabisation, laquelle dépassera le legs linguistique et cul­turel colonial. Certes, la L.A.E.F. possède une légitimité idéologique tout en étant transitoire et marginale. Les approches des critiques arabo­phones se polarisent autour de la problématique de la langue et renvoient implicitement aux facteurs du religieux, du national, de l'arabisation, de la lisibilité et de l'engagement politique. Ces facteurs dans leur corrélation agissent sur l'écriture, le statut social de ce groupe d'écrivains, sur la lec­ture et la réception des oeuvres, et en dernier lieu, sur le rapport de la litté­rature au pouvoir. Enfin, ces discours critiques ignorent l'articulation de la L.A.E.F. avec les cultures populaires orales, et se polarisent sur la langue, non pas comme matériau à travailler, mais comme constante figée et sa­crée, qui n'a pas de rapport avec la "littérarité" ou la "poétique" du texte, en tant que structure symbolique significative[12]

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La réception de la L.A.E.F. par les traducteurs et critiques arabes.

 

     Plusieurs critiques arabes ( Taha Hussein, Y. Hakki, I. Kilani, Ch. Ayyad, Ghali Choukri) voient dans la L.A.E.F. une forme spécifique d'expression de l'Algérie moderne. Pour eux l'algérianité de cette littéra­ture se réalise dans le texte, à travers l'idéologie de la résistance, et dans le fait qu'elle puise ses références dans le patrimoine culturel et civilisa­tionnel arabo-musulman de l' Algérie. Quant à N. Selman et Souad Khodr Ahmed[13], elles ne contestent nullement l'algérianité de cette littérature tout en la situant dans le contexte du bilinguisme de déchirement enraciné dans le moi algérien. Le critique égyptien, M. Ahmed Atia, inscrit la trilogie de M. Dib par exemple dans la littérature et le roman arabe moderne, puisqu'il puise sa substance formelle et idéologique dans la langue mater­nelle et la culture traditionnelle[14].

 

     Le traducteur de la trilogie de Dib, le Syrien Sami Eddouroubi, place la L.A.E.F. dans son contexte historique caractérisé surtout par la dépos­session culturelle et linguistique. Il considère que les écrivains algériens sont dépossédés de leur langue d'écriture (l'arabe), et qu'ils ont utilisé la langue française comme écrivains arabes et nationalistes, car l'emprunt de l'outil linguistique ne signifie nullement l'emprunt d'une identité, même si cet emprunt a engendré une certaine tension de l'énonciation. A ce ni­veau la traduction de cette littérature est une double trahison. Malgré sa langue d'écriture, la L.A.E.F. reste une traduction, car, les événements, les personnages, les nuances, les procédés formels, les structures imagina­tives, les visions du temps et de l'espace, etc... renvoient tous à l'environnement culturel arabo-musulman. Ainsi nous sommes devant une traduction paradoxale, un double malaise, une traduction de la traduction, un retour du texte au bercail originaire et originel. Ce traducteur apprécie le réalisme de cette littérature et sa vision révolutionnaire alimentée par une poétique intense qui permet de brosser un tableau caractéristique de la situation coloniale en Algérie[15]. Malek Abiod Aïssa, la traductrice sy­rienne de Kateb Yacine, considère la L.A.E.F. comme une littérature algé­rienne et arabe ayant utilisé le français comme moyen d'expression pour retracer la marche du peuple algérien arabe avec une vision poétique in­tense et révolutionnaire. Ainsi Kateb Yacine est un écrivain arabe, issu d'une tribu arabe, faisant partie des prolétaires algériens et assimilant leur culture et leur mentalité. Nedjma est une oeuvre arabe originale, écrite dans une langue magnifique, poétique et réaliste, qui renvoie à la tradition d'écriture et de narration arabe[16].

 

     Ainsi, les traducteurs arabes (Eddouroubi, M. Aïssa, S. Garmadi, K. Djillali, et M. Begtache) décèlent la légitimité de la L.A.E.F.,avant tout dans les références culturelles, dans le texte et dans la fidélité à exprimer le moi et la révolution algérienne, ce qui n'en diminue en rien la richesse poé­tique. D'un autre côté, il apparaît clairement que la traduction et la récupé­ration de cette littérature entrent dans un projet nationaliste arabe d'abord, qui a motivé le soutien des intellectuels arabes à la révolution algérienne. Cette traduction a été intense au cours des années soixante, puis a dimi­nué après les indépendances, ce qui a reposé de nouveau le problème du retour du texte au Maghreb. C'est ce qui a incité Lacheraf à appeler à un double effort de traduction. Or cet appel n'a pas eu la résonance qu'il mé­ritait. L'indépendance a produit un rapport problématique entre le littéraire et le politique. En outre, le développement de la L.A.E.F., sa capacité à passer de la critique de l'Autre à la critique du Moi, du politique, du social, de l'histoire ont provoqué chez les critiques arabes et algériens un certain silence et engendré un semblant d'ignorance du "domaine francophone" de la culture algérienne. Cette littérature est devenue par la force des choses une littérature "émigrée"[17], destinée à l'autre et s'inscrivant dans le domaine du syncrétisme ou de l'universalisme culturel.

 

 

 

 

 

 

 

LA TRADUCTION DE LA L.A.E.F. PAR LES CHIFFRES[18]

 

 

     Les traductions de la L.A.E.F. portent essentiellement sur la "géné­ration de 1952", et le genre romanesque :

 

     - Dib: 6 oeuvres (romans et nouvelles)

     - Kateb Yacine: 4 oeuvres (roman - théâtre - poésie)

     - Feraoun: 4 oeuvres (romans et journal)

     - Haddad: 3 oeuvres (romans et article)

     - A. Djebbar, B. Hadj Ali, Anna Greki, J. Senac et Mouloud Achour: 1 oeuvre

 

     Parmi les traducteurs on peut citer les noms de C. Eddouroubi, M. Abiad Aïssa, G. Salem (Syrie) qui ont traduit Dib et Kateb Yacine; S. Gar­madi, H. Karaoui (Tunisie) qui ont traduit Haddad et Boudjedra, Khellas  Djillali, Hanafi Benaïssa et Bagtache Merzak qui ont traduit Boudjedra et Feraoun. La maison d'édition tunisienne Dar Srasse - Le Seuil, et sa col­lection "Le retour du texte" mérite l'attention puisqu'elle a publié des tra­ductions nouvelles de Kateb Yacine, Feraoun, Boudjedra, Chraïbi, Ben Jelloun.

    

     Partant de ces données statistiques, nous remarquons que la tra­duction de la L.A.E.F. est limitée. En outre, les traducteurs se penchent plutôt vers cette littérature dite littérature de la révolution, excluant ainsi les nouveaux textes (Dib, Kateb Yacine, A. Djebar, N. Farès, Mimouni, Djaout). Cet état de fait reflète les transformations, les coupures entre la littérature et l'institution de la littérature algérienne, ainsi que l'éloignement des écrivains de langue française de ces rouages (maisons d'édition, union des écrivains, activités littéraires et culturelles officielles, etc...), la publication de leurs oeuvres à l'étranger, et l'existence d'une certaine cen­sure individuelle ou collective. Cette traduction marginale et sélective il­lustre en elle-même une distance se renforçant, entre la L.A.E.F. et son lectorat parmi les nouvelles générations, surtout les jeunes scolarisés en arabe.

 

 

 

 

RUPTURE OU INTERTEXTUALITE

 

 

     L'Algérie est paradoxalement un des pays les plus fermés à la cul­ture de la modernité arabe, du fait d'abord des barrières anciennes et de la dominance de la culture arabe et algérienne réformiste et islamiste, la­quelle a retardé et figé la littérature dans les genres anciens et n'a pas permis l'apparition du roman et du théâtre. Jusqu'aux années soixante-dix, l'arabe y était une langue qui se rattachait au Livre, au Sacré, au trans­cendant plus qu'à la recherche des écritures, des vécus et des visions nouvelles. Il paraît paradoxal aussi que la plupart des traducteurs de la L.A.E.F. soient des Moyen-Orientaux et des Tunisiens. Les écrivains algé­riens bilingues sont rarissimes, tant au niveau de la critique qu'au niveau de la création.

    

     Qu'en est-il de la relation entre littérature de langue arabe et litté­rature de langue française en Algérie ? Afin de saisir les grandes lignes de cette "intertextualité", nous avançons certaines hypothèses de recherche:

     - Le roman de langue arabe chez T. Ouettar et A. Benhaddouga se structure et se constitue dans une certaine continuité avec le roman dibien (réalisme, critique de la société coloniale, vision marxisante) et katébien: il y des des influences de style, de structure entre Nedjma et El djasia wa Eddarawiche de Benhaddouga, et Le séisme de Ouettar.

     - La récupération de la L.A.E.F. par les écrivains arabophones se situe au niveau de l'idéologique, du littéraire et de la modernité de l'écriture.

     - Certains écrivains nouveaux (Mimouni et Djaout) poursuivent la ligne de la critique sociale, idéologique et politique, commencée par les oeuvres de Ouettar et Benhaddouga dans L'as et Les martyrs revien­nent cette semaine, etc.

     - L'importance du dialogue entre les deux langues d'une même litté­rature impose une méthode comparative entre la langue de départ et la langue d'arrivée dans les oeuvres. Le travail sur la langue acquiert ainsi une richesse intense: Nedjma, Le démantèlement, Mille et une année de nostalgie, Qui se souvient de la mer...

 

     Sans doute, le retour du texte algérien et maghrébin est en lui-même une création ou re-création car ce processus engendre une accultu­ration interne, un transfert de la modernité littéraire et des modes d'ancrage différents dans les cultures populaires. Mais pour conclure, il me semble qu'aucun discours sur la littérature algérienne actuelle ne peut désormais ignorer l'état de la littérature écrite en langue nationale c'est-à-dire l'arabe.

 

 

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   wpe2.jpg (3090 octets)   Extrait de la revue Itinéraires et contacts de cultures, Paris, L'Harmattan et Université Paris 13, n° 10, 1° semestre 1990.
Copyright L'Harmattan et Université Paris 13. Tous droits réservés.

 

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[1]/ ADONIS. La poétique arabe. Sindbad, Paris,1984. Dar el Adad,    Beyrouth, 85 (en arabe)        

 

[2]/ Culture et enseignement en Algérie et au Maghreb, Maspero, Paris.

 

[3]/ La culture algérienne contemporaine. Essai de définition et perspectives. Ed. du parti, 1968, pp. 25-26.

 

[4]/ L'Algérie Nation et Société. Traduction Hanafi Benaissa. Alger, ENAL, 1984 (en arabe)

 

[5]/ BELLAHCENE (Amar): Intellectuels ou intelligentsia en Algérie. Dar    El Adatha, Beyrouth, 1986 (en arabe)

 

[6]/ REKIBI (Abdellah). La Nouvelle dans la littérature algérienne contemporaine. Dar El Kitab El Arabi, Le Caire (Egypte), 1969, p. 243 (en arabe)

 

[7]/ Arabiser la pensée d'abord, ENAL, 1986, (en arabe)

 

[8]/ CHERIET (Abdellah), cité dans: Culture Algérienne dans les textes, choix et présentation par Jean Dejeux, Alger-Paris, O.P.U., Publisud, p. 122

 

[9]/ El MILI : L'Algérie et la question culturelle..., Revue du Centre d'Etudes de l'Unité Arabe, Beyrouth, n° 46, déc. 1982, p. 161. (en arabe).

 

[10]/ SAADI (Othman). La question de l'arabisation en Algérie. Dar Ettalia, Beyrouth, 1968, p. 19 (en arabe); et Sur la littérature algérienne d'expression française: M. Mammeri, Revue El Adab, Sept. 1960 (en arabe).

 

[11]/Le développement de la littérature arabe contemporaine en Algérie: 1925-1950. Alger, SNED, 1983, pp. 25-26 (en arabe).

 

[12]/ GADANT (Monique): "20 ans de littérature algérienne" in Les temps modernes. n° spécial Algérie, 1982.

 

[13]/ SELMAN (Nour): La littérature algérienne entre le refus et la libération. Dar El Ilm, Beyrouth; 1981, p. 282 (en arabe). CHOUKRI (Ghali): La littérature du combat.         Dar El Maaref, Le Caire, 1970 (en arabe).KHODR AHMED (Souad): La littérature algérienne contemporaine. El Maktaba Elasria, Beyrouth, 1967 (en arabe)

 

[14]/ ATIA ( Ahmed Mohamed): Le héros révolutionnaire dans le roman arabe moderne. Ministère de la Cul­ture, Damas (Syrie) 1977, pp.35-37

 

[15]/ DIB (Mohammed). La trilogie de l'Algérie. Traduction Samy Eddouroubi, Dar El Talia, Beyrouth, 1968, l'Introduction du traducteur pp. 5-12 (en arabe)

 

[16]/ KATEB (Yacine). Nedjma. Trad. Malka Abiod Aïssa,El-Mouassassa Elaribia. Beyrouth, 1962; Les ancêtres redoublent de férocité, et Le cadavre encerclé, El Mouassassa Elarabia, Beyrouth, 1979 (en arabe)

 

[17]/ SEBTI (Youcef). "La littérature algérienne d'expression française est une littérature émigrée" in Révolution Africaine, n° 1181, 12 déc.1986

 

[18]/ Pour les statistiques de la traduction, on a consulté, outre les traductions elle-mêmes: ENAL, Catalogue général : 1966-1986 : 20 ans de production, 1986.